Une lentille intraoculaire qui a du cachet…

Par Dre Dominique Meyer

Patience et longueur de temps valent mieux que force ni que rage… enfin la voilà! Elle est arrivée la star tant attendue, la fameuse lentille intraoculaire AcrySof® CACHETTM, manufacturée par Alcon, le leader mondial en ophtalmologie chirurgicale.

Pour certains forts myopes (entre -6 et -17 dioptries), qui doivent souvent combiner verres de contact et lunettes pour arriver à obtenir une vue convenable (mais sans plus), cette lentille s’avère une solution très intéressante. En effet, elle agit un peu comme si on installait de façon permanente un verre de contact à l’intérieur de l’œil du patient. On contourne ainsi les problèmes de minification d’images inhérents à ce type de correction, on évite les intolérances aux verres de contact et on donne au patient concerné une autonomie sans précédent.

Particularités de la lentille CACHET

La lentille CACHET est une lentille phaque qui s’implante dans la chambre antérieure et dont les haptiques se déposent dans l’angle avec un minimum de contact. La lentille est en acrylique souple, en fait un copolymère d’acrylate-méthacrylate avec absorbeur UV, comme la plupart des implants maintenant utilisés en chirurgie de la cataracte. Elle possède une biocompatibilité parfaite et n’aura pas besoin d’être enlevée tant que la condition du patient ne nécessitera pas de chirurgie de la cataracte. Dans ce type d’intervention, le cristallin est préservé ce qui est grandement souhaitable chez ces forts myopes, en raison du risque accru de décollement de la rétine lorsque le cristallin est retiré. En effet, l’extraction du cristallin entraîne un mouvement antéro-postérieur du vitré créant ainsi des tractions de ce dernier sur la rétine qui peuvent alors provoquer des déchirures de la rétine et un décollement subséquent.

La lentille est conçue pour demeurer assez loin du cristallin afin de ne pas l’endommager, et suffisamment distante de la cornée pour ne pas créer une diminution du décompte endothélial significatif avec les années. On prend soin de mesurer ce décompte endothélial en préopératoire avec un microscope spéculaire.

Les candidats

Cette technologie convient parfaitement aux candidats de 20 à 50 ans ne présentant pas d’opacité cristallinienne. Cet implant convient également aux candidats avec une myopie modérée, mais ayant une cornée trop mince pour envisager une correction au laser excimer par lasik. La pupillométrie en condition mésopique ne doit idéalement pas dépasser 7 mm pour une performance optimale de cet implant sans éblouissements.

Il faut également s’abstenir de proposer cet implant aux patients présentant un astigmatisme de plus d’une dioptrie, à moins que celui-ci soit prêt à envisager une retouche au laser dans les mois suivants la mise en place de sa lentille pour corriger un cylindre résiduel.

Modus operandi

La lentille CACHET ne nécessite aucune préparation préopératoire particulière et s’insère en quelques minutes par une incision de 2,7 mm qui ne requiert aucune suture pour sa fermeture. Des gouttes antibiotiques et anti-inflammatoires sont prescrites de routine en postopératoire.

Le patient est très fonctionnel dès le lendemain de la chirurgie et on pratique habituellement la chirurgie du deuxième œil la semaine suivante. Les activités physiques violentes sont restreintes pour une période de 15 jours et on demande également au patient d’éviter de se frotter les yeux afin de ne pas provoquer d’attouchement entre l’implant et l’endothélium cornéen que nous savons très fragile.

Une efficacité probante

Les complications d’une telle intervention sont peu fréquentes, mais on doit en informer adéquatement les éventuels candidats. Quoique moins rencontrée qu’avec des implants phaques de chambre postérieure telles les lentilles ICLTM (Implantable Collamer® Lens) de Staar Surgical, une cataracte est toujours possible. On rapporte aussi des augmentations de pression intraoculaire nécessitant un traitement dans environ 3 % des cas recensés dans la littérature.

Lorsque l’on demande aux patients opérés s’ils reprendraient la même décision pour cette intervention avec la lentille Cachet, ils sont 96 % à manifester leur satisfaction. Cette chirurgie est d’ailleurs tout aussi gratifiante pour le patient que pour le chirurgien tant les résultats sont spectaculaires.

La réussite d’une telle intervention passe également par une sélection judicieuse des patients. On doit choisir des candidats vraiment motivés qui ne peuvent plus envisager le port permanent de lentilles cornéennes ou de lunettes. Évidemment, un profil psychologique sain du candidat est également préférable pour obtenir sa pleine collaboration tout au long du processus. Cependant, peu de médecins auront accès à cette technologie très pointue. C’est pourquoi, je vous encourage à vous renseigner sur cette avancée chirurgicale majeure. Vos patients vous en seront certainement reconnaissants!